Prendre les retraites en otage
Les
récents évènements de manifestation de desespoir de la jeunesse
illustre de manière violente l'impasse dans laquelle a été dirigée
toute une génération. On nous avait promis du boulot si on faisait des
études (cela évitait ainsi de gonfler les chiffres du chômage), et ce sont les métiers du bâtiments qui ont le vent en poupe
pendant que la recherche et le milieu universitaire se casse la gueule.
De longues années d'études signifient aussi une plus grande frustration
en cas de chômage. L'Etat n'assume pas sa jeunesse en se désengageant
des quartiers, en limitant de manière drastique les financements
universitaires, en ne renouvelant pas son cortége de fonctionnaire (si
bien que dans 15 ans, il y aura un fonctionnaire actif pour deux
fonctionnaire retraités ! Elle est belle la solidarité à sens unique
qui fait que le jeune qui est au chômage aujourd'hui devra payer les
retraites de ceux qui refusent aujourd'hui de l'embaûcher !).
Les jeunes sont exclus de la politique :
la seule véritable confrontation télévisée fut un simulacre de
dialogue, et encore, on pouvait voire le fossé qui sépare la jeunesse
de la génération précédente. De manière globale, la jeunesse est
aujourd'hui bridée par ceux-là même qui jetaient des pavés il y a
presque 40 ans. Ce qu'on reproche aujourd'hui aux jeunes finalement, ce
n'est pas tant de brûler des voitures que d'être incapables de créer un
mouvement fédérateur, de nommer un véritable interlocuteur qui
rassemblerait toutes les composantes de la jeunesse.
Voilà pourquoi
il devient nécessaire de se rassembler pour faire valoir nos points de
vue, aussi contradictoire puissent-ils être. Alors que nous allons
hériter d'un pays exsangue, nous n'avons quasiment aucun poids démocratique
(en terme démographique, la génération du baby-boom pésera toujours
plus lourd que la notre). A terme, il est à craindre que les décisions
importantes ne soit prises par une bande de retraités complétement
déconnectés des réalités quotidiennes des actifs et de la jeunesse.
C'est déjà le cas ? Ah bon ...
Il
faut mettre dans la balance le fait que nous allons devoir payer les
retraites dans quelques années, que nous allons nourrir ce pays. Face à
cette responsabilité, il est plus que normal que nous soyons associés
dés aujourd'hui
aux décisions collectives et que l'on arrête de stygmatiser la jeunesse
parcequ'elle ne se reconnaît pas ni dans l'image de voyous émeutiers
que tentent de nous faire passer certains politiques et médias, ni dans
l'image de nos propres parents, incapables d'avoir réussi à enrayer
tout un tas de dérives (économiquies, sociales, communautaires ...)
qu'ils dénoncent eux-mêmes (le fameux "non" à la Constitution). Si
notre rôle consiste à accepter tout ce qu'on nous impose, je crois que
vous avez oublié ce que cela signifiait d'être jeune.
L'avenir passe par la jeunesse. Or, être jeune en politique
aujourd'hui, c'est avoir moins de 60 ans.
Les stagiaires ont
manifesté ces jours-ci, mais peu d'espoirs à la clé, sinon celui d'un
compromis, d'un accord-du-moins-pire. Il faut adopter une attitude
active face à l'oppression, non pas patronale comme on aimerait nous le
faire croire, mais générationnelle.
Je propose de menacer de
refuser de payer les retraites dans 15 ans. Cela laisse le temps de la
discussion, cela nous laisse également le temps pour proposer des
points de convergence globaux, à l'échelle de la société, et pas
seulement pro-jeunesse. Car notre but n'est pas de prendre notre
revanche sur un systéme qui stygmatise les jeunes tout leur mentant et
en leur imposant les retraites de demain. Non, le but d'une telle
contestation serait de construire un monde ensemble, vieux et jeunes,
en se demandant ce que l'on souhaite vraiment.
Ne pas payer les
retraites peut paraître trés cruel. Mais empêcher une génération de
travailler et d'investir pleinement le champ politique l'est tout autant, surtout quand on impose à celle-ci de
payer des retraites exhorbitantes sans même savoir si cela ne risque pas de totalement précarisé cette génération. Sans être violente, la constestation
peut néanmoins être très virulente. Une telle menace, si elle paraît
peut-être démesurée, est à la hauteur de la frustration que peuvent
éprouver les jeunes, de banlieues ou d'ailleurs.
PS : si tu es
jeune et que tu ne te reconnais pas dans la galère que j'expose,
profites de ta chance, mais n'oublie pas que tu pourrais toi-aussi être
au bord de la route ...
EDIT : une dépêche est parue le lendemain de cette note : elle s'intitule (ou s'intitulait si le lien ne marche plus) Le secteur de l'emploi pas sûr de bénéficier de la retraite des baby-boomers
EDIT 2 : ce groupe d'action pourrait s'appeler le GRAUPPOR pour Groupe Radical d'Action Unitaire Pour la Prise en Otage des Retraites, il veut bien dire ce qu'il veut dire, et cela reste quand même bien décalé pour un groupe politique ...